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Vistas de Cuba / Views of Cuba VIII

Lecture

Lu pendant le voyage : un recueil de nouvelles de Reinaldo Arenas, auteur cubain (exilé). Très très fort.

Je parlerais vite et mal. Alors ne vous faites pas d'illusion avec votre espèce d'appareil. (......) Maintenant que Fidel Castro est tombé, qu'on l'a renversé ou qu'il en a eu assez, tout le monde parle, tout le monde peut parler. Le système a changé à nouveau. Ah maintenant, tous les gens sont des héros. Maintenant, tous les gens, paraît -il, étaient contre. Mais à l'époque, quand à chaque coin de rue il y avait un Comité de surveillance : cette chose qui observait nuit et jour les portes de chaque maisons, les fenêtres, (...) tous nos gestes, toutes nos paroles, tous nos silences (...) comment était notre vie sexuelle (...) nos maladies et nos illusions...

Tout cela aussi était contrôlé. Oh je vois bien que vous ne me croyez pas. Je suis vielle. Vous pouvez le penser si ça vous plait. Je suis vielle, je délire. Vous pouvez le pensez. Tant mieux. Maintenant on peut penser - vous ne me comprenez pas. Est-ce que vous ne comprenez pas qu'à l'époque on ne pouvait pas penser ? Mais maintenant oui, n'est-ce pas ? (....) C'est sûr, je peux dire ce qui me plaît ? C'est vrai ? Dites-le moi. Au début, je ne pouvais pas y croire. Maintenant non plus. Les temps changent. J'entends parler de nouveau de liberté. A grand cris. C'est mauvais signe. Quand on crie de cette manière : "Liberté !" en général, ce que l'on souhaite c'est l'inverse. (.....) Maintenant il y a une foule de témoignage, bien entendu (...) tout le monde était, comme c'est mignon, contre la tyrannie. Je n'en doute pas. Ah, mais à l'époque, qui ne faisait pas état d'une affiliation politique, dûment visée par le régime ? Renseignez-vous bien, votre père ne fut-il pas milicien peut-être ? N'est-il pas allé, peut-être au travail volontaire ? Volontaire, c'était ça le mot. Moi même, à la chute de Castro, j'ai failli être fusillée comme castriste. Quelle horreur. Ce qui m'a sauvé, ce sont les lettres que j'avais envoyées à ma sœur exilée (....) Ainsi, vous me demandez de parler, de contribuer, de coopérer - pardon je sais ce langage n'est plus de notre époque - en racontant ce que je pourrais savoir, car vous prétendez faire un livre, où Dieu sait quoi, sur l'une des victimes.(...)